mardi 17 mai 2011

Communiqué Affaire Bara Tall/ Etat du Sénégal

Syndicat National des Entreprises du Bâtiment et des Travaux Publics (SNBTP)

Communiqué : Affaire Jean Lefèvre Sénégal

A la veille de la délibération du procès décisif de Jean Lefèvre Sénégal (JLS), les professionnels du secteur du bâtiment et des travaux publics étaient dans une dynamique d’observation et de retenue avec la conviction que la justice fera son travail.

Mais, nous constatons que :

Ø Le désordre et la cacophonie dans le réquisitoire de ce procès ne sont rien d’autre que la résultante des dysfonctionnements de notre système judiciaire et des pressions politiques reconnues publiquement par l’autorité judiciaire ;

Ø Parmi quatre vingt six (86) contrats impliquant trente sept (37) entreprises accusées toutes de surfacturation, la justice n’en a retenu que quatre (4), avec un acharnement manifeste sur Jean Lefèvre Sénégal et son leader.

Ø Dans cette présente procédure, la justice laisse de côté la responsabilité de l’autorité administrative contractante et celle de la Commission Nationale des Contrats de l’Administration (CNCA). Quand même, un seul individu ne peut signer un marché, l’approuver, l’exécuter, se faire payer et le réceptionner comme il veut ;

Ø L’environnement des affaires au Sénégal est menacé par l’insécurité juridique et judiciaire qui guette tout investisseur, tout opérateur économique. En effet, le contrat public risque de ne plus avoir de crédit lorsque l’administration publique refuse délibérément d’honorer ses propres engagements remettant ainsi en cause l’autorité de la chose jugée ;

Ø Le rapport d’expertise, pièce maitresse du procès, est un document versatile, truffé d’incohérences et d’erreurs qui lui ôtent toute valeur scientifique, juridique et ne saurait servir de base à une quelconque inculpation ;

Face à ces faits inédits, qui ont altéré notre confiance en notre système judiciaire, il était de notre devoir, pour nous, professionnels du secteur du BTP de rompre le silence et de faire le procès du rapport d’expertise des chantiers de Thiès tant décriés, avec le réquisitoire qui suit :

  1. La démarche des experts est d’emblée à corriger car un rapport d’expertise ne peut en aucun cas se substituer à un contrat, quelque soit sa pertinence ;
  2. Sur quel référentiel technique, juridique ou administratif repose le concept, la notion de surfacturation ? Les experts gagneraient à s’accorder avec les professionnels sur ce terme ;
  3. Le rapport a été établi par des experts non qualifiés pour les routes et les errements relevés traduisent avec éloquence leur méconnaissance du secteur routier ;
  4. Les fautes déontologiques et les problèmes d’éthique relevés lors de l’analyse prouvent que les experts ont été les bras armés, à charge, des politiques. A ce sujet, notre organisation demande à l’ordre des experts et évaluateurs d’agir au vu des lourdes conséquences de leurs actes.
  5. Nous avons aussi relevé de nombreuses affirmations gratuites dans le document : en effet, les experts ont établi des quantités qui n’étaient plus mesurables après la réalisation des ouvrages. C’est le cas des micro-pieux et de bon nombre d’ouvrages que nous nous réservons de citer.
  6. Les experts commis ont eu à mélanger beaucoup de concepts, ce qui traduit leur manque d’expertise dans cette spécialité et leurs insuffisances dans la méthodologie :

· Confusion entre élagage et abattage d’arbres à l’engin ;

· Comparaison de prix unitaires pour des postes d’évaluations qui n’avaient pas la même unité de valeur ;

· Non prise en compte du ciment incorporé dans la latérite concernant les estimations de la couche de base ;

· Non prise en compte des conclusions du laboratoire qu’ils ont commis pour les sondages.

· Confusion entre béton bitumineux (0/14) assimilé à un matériau à importer alors qu’il est fourni par les carrières locales ;

· Non maitrise des procédés et protocoles de contrôle aux niveaux des routes, etc.

  1. Le principe fondamental d’intangibilité des offres a été violé par les experts qui ont fixé des prix pour des marchés approuvés et en cherchant à en substituer d’autres à partir de contrats qui n’avaient pas les mêmes réalités économiques. En outre, il faut souligner que les coefficients d’entreprise varient d’une entité à une autre, d’une catégorie à une autre, d’une spécialité à une autre.
  2. Il a été constaté une variation de 40% des prix fixés par les experts, entre le rapport provisoire et le rapport définitif. Cette disparité explique la volonté de servir les objectifs inavoués de maintenir les surfacturations ciblées.
  3. Le séparateur central (ouvrage séparant les deux voies) d’une valeur estimée à cinq cent millions (500.000.000) FCFA qui n’a pas été réalisé et facturé a été comptabilisé par les experts comme poste de surfacturation.
  4. Les experts ont fait de nombreuses extrapolations qui contrarient tout esprit doué de raisonque nous nous garderons d’énumérer. A titre d’illustration, citons l’exemple ci après : « Avec les sept milliards (7.000.000.000) FCFA alloués à la VCN d’une longueur de 10,5 km, on pouvait faire 80 km de route».
  5. La liste des insuffisances est loin d’être exhaustive.

Face à ce réquisitoire, notre délibération reste sans appel : ce rapport d’expertise déclassifié sur les chantiers de Thiès ne peut servir de base à une inculpation.

Par conséquent, nous invitons les juges à demeurer dans les valeurs et principes cardinaux qui ont toujours été les siens : la dignité, le courage, l’indépendance, la justice et l’équité, étant donné que dans un Etat de droit, force doit rester à la loi à condition que ces principes sacrés soient respectés.

Donc aujourd’hui, le principal enjeu de ce procès est de rendre une décision juste et équitable pour éviter de plonger notre pays dans la tourmente car un système judiciaire qui ne rend pas justice amène les citoyens à se rendre justice, pire c’est une situation qui mène à la destruction de la Nation.

En définitive, nos attentes reposent sur l’espoir de voir :

  • D’une part, une justice libre et vertueuse, certes, affranchie de la tutelle pesante de l’exécutif mais aussi libérée de tout autre pouvoir constitutionnel et social ;
  • D’autre part, des juges libres armés d’une conscience nouvelle et affranchie.

Telles sont les attentes des citoyens.

Le Comité Directeur